Le combat pour le respect de la vie privée a été sali par la position de Guillaume Champeau sur le pistage des jets privés. Au titre d’être moi aussi un défenseur du droit à la vie privée, je souhaite publiquement apporter mon soutien aux luttes écologiques.
Commençons par faire un constat simple basé sur des recherches scientifiques, histoire de remettre les pieds sur terre. Une personnes sur cinq meure de la pollution atmosphérique en France. Cela représente 100 000 personnes par an selon une estimation d’une étude de 2021 de Vohra et al. Pour vous donner une idée, on compte 150 000 morts de la Covid depuis le début de l’épidémie (soit sur une période de deux ans et demi), loin de l’estimation des 100 000 morts par an de la pollution de l’air. Hasard de l’actualité, le journal Le Monde a publié une vidéo il y a deux jours rappelant que l’avion est le mode de transport le plus émetteur et que les transports sont la principale source de production de carbone.
Face à ce constat alarmant, nous devrions prendre des mesures drastiques concernant toutes les activités polluantes humaines. Faire un voyage en jet privé est tout simplement un écocide. L’impact sur l’environnement est direct, mesurable, avéré et il devrait être puni très fermement par de l’emprisonnement. Les mesurettes proposées au début de l’article de Guillaume Champeau, dont il n’a même pas le courage de faire siennes, ne sont clairement pas suffisantes. En outre, il met sur le même plan des mesures qui ne peuvent être prises uniquement par les gouvernants et une action citoyenne qui est amoindrie comparée à ce qui est déjà fait sur les réseaux sociaux. Autrement dit, il propose soit des actions qui ne sont pas réalisables, soit une action réalisable mais qui va à l’encontre de la lutte écologiste.
La publication de la position imprécise (limitée à l’aéroport donc à la ville) d’un jet privé est selon moi justifiée. En publiant le lieu, cela permet de se rendre compte que les jets privés ne voyagent pas seulement vers des destinations exotiques ou en Amérique mais aussi chez nous en France souvent entre des villes qui disposent de lignes de train. Sans évoquer les actions règlementaires qu’on peut tenter d’obtenir localement auprès des autorités publiques, la position pourrait également permettre d’organiser d’autres actions comme des manifestations pour dénoncer voir empêcher l’atterrissage et le décollage de ces jets privés.
Il est évoqué dans l’article une mise en balance entre le droit fondamental du respect à la vie privée et le droit « à vivre sur une planète la moins polluée possible ». La formulation est ici très imprécise et tend à sous-estimer l’impact climatique des jets privés. Comme je l’ai montré au début de l’article, les jets privées contribuent directement à la pollution atmosphérique responsable de 100 000 morts par an en France. Nous parlons de décès qui surviennent aujourd’hui en France pour une situation qui ne peut qu’empirer. Il ne s’agit pas que de « la planète » mais de nous tous et toutes. L’impact de l’aviation est direct, mesurable et avéré. Il touche des milliards d’individus. La pollution de l’air détruit votre corps à chaque bouffée d’air. La mise en balance me semble donc très largement favorable pour la publication de données personnelles des plus gros pollueurs qui sont, encore une fois, directement responsables d’écocide et de la morts de nombreuses personnes, qui le font par choix, et ce, en toute impunité. Le respect de la vie privée d’une très faible minorités de personnes (qui devraient être emprisonnées pour leurs actions écocidaires) ne saurait entraver les luttes écologiques. La conséquence sur la vie privée est ridicule comparée à l’impact direct, mesurable et avéré sur la survie de milliards de personnes à qui on n’a pas demandé leur consentement. Si vous vous sentez choqué par ces propos, sachez qu’il n’y a strictement aucune exagération dans ce que j’ai écrit. Je le répète, les avions émettent une quantité pharaonique de pollution qui provoque le décès de nombreuses personnes.
En tant que militant dans le domaine de la vie privée, je me dois d’apporter mon soutiens envers les luttes écologiques. La position de Guillaume Champeau sur la publication de l’emplacement des jets privés me semblent totalement hors-propos et décrédibilise le combat pour la vie privée. Ce combat est pour moi la mère des luttes, celle qui permet aux luttes écologiques, féministes, sociales d’être menées sans l’ingérence des puissants.
- Lorsqu’un violeur et/ou harceleur n’est pas poursuivit parce que les plaintes ne sont pas traitées, publier leurs agissements dans la presse ou les réseaux sociaux est nécessaire et vital.
- Lorsque des forces de l’ordre sont violents lors d’une manifestation, publier leurs agissements dans la presse ou les réseaux sociaux est nécessaire et vital.
- Lorsque des milliardaires détruisent la planète et pollue l’air qu’on respire alors qu’aucune loi ne leur empêche, publier leurs agissements dans la presse ou les réseaux sociaux est nécessaire et vital.
2 réponses à “Ma réponse à Guillaume Champeau sur le pistage des jets privés”
Bonjour,
Il me semble que vous faites une confusion regrettable avec les exemples que vous donnez.
Par principe républicain, les agents de l’état dans l’exercice de leurs fonctions sont contrôlables par les citoyens qu’ils sont censés représenter.
Le respect de la vie privée est aussi un principe applicable à tous les citoyens.
Ce n’est pas une « valeur » qui fluctue (à la bourse ?) au gré des personnes auxquelles elle s’applique mais bien un principe fondamental et intangible, inscrit dans la constitution et la déclaration des droits de l’homme, auquel toute personne a en effet droit, qui qu’elle soit.
Alors oui, mille fois oui, il est normal que les agissements des forces de l’ordre soient contrôlés par tous.
Et non, mille fois non, ce n’est certainement pas à la presse de livrer en pâture la vie sexuelle des gens, tout présumés délinquants qu’ils soient. C’est à la justice d’enquêter si des crimes ou délits ont été commis et à l’état d’organiser le recueil de la parole des victimes dans les meilleures conditions.
Je me souviens de l’étalage nauséabond des pratiques sexuelles du « riche » DSK dans l’affaire dite « du Carlton de Lille » – qui s’est terminée, rappelons-le, par un non lieu – alimenté avec la complicité d’un petit juge pudibond du nord ayant trouvé sain de faire fuité les détails les plus intimes des comptes rendus des ses auditions.
Quand aux milliardaires, je doute que la simple publicité de quelques déplacements individuels, qu’ils étalent par ailleurs dans la presse people, ne modifie en quoi que ce soit leurs habitudes néfastes.
Marteler les simples faits sociologiques devrait suffire : par exemple, concernant le bilan carbone, en France, individuellement, les 1% les plus riches rejettent 67 fois plus de CO2 que les 50% les plus pauvres.
Tout ce qui met en évidence la sécession des ulra-riches de manière concrète me parait bien plus productif à publier que de faire du name dropping des quelques-uns qui n’arrivent pas encore à se planquer.
Mais c’est un avis tout personnel !
Je n’ai pas compris pourquoi vous évoquez les forces de l’ordre. Ça semble totalement hors-sujet. Il s’agit ici d’un flagrant délit de crime contre l’humanité. Je ne crois pas que les responsables doivent avoir le droit au respect de la vie privée, de surcroit sur des données qui ne sont pas des données personnelles. Merci également de préciser les sources de vos chiffres et en quoi cela justifierait l’inaction que vous prônez. Pour le reste je vous invite à lire : https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/08/17/jets-prives-des-milliardaires-ce-n-est-certainement-pas-une-curiosite-mal-placee-qui-incite-le-public-a-s-interesser-a-ces-vols_6138209_3232.html